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samedi 13 juillet 2013

LA CARTE ET LE TERRITOIRE - Michel HOUELLEBECQ




Autant l'avouer tout de suite : Houellebecq est mon écrivain français préféré! Il est l'un des rares à s'intéresser à des questions scientifiques, économiques, sociologiques, voire métaphysiques, c'est-à-dire tout simplement à voir plus loin que son nombril.
Autant le dire aussi : son chef-d'oeuvre, c'est Les particules élémentaires. Mais le reste de sa production est largement au dessus de la moyenne, y compris ce La carte et le territoire, "Houellebecq" sexless et sans provoc, paramétré pour obtenir le Goncourt que Les particules aurait dû remporter en leur temps.
Mais revenons à cette Carte... Dès le début, on se dit que Houellebecq fait du Houellebecq à fond, tout comme on peut se le dire de Tarantino dans certains de ses films.
Il cite des marques commerciales à tire-larigot et décrit des notices d'utilisation, il s'en donne aussi à cœur joie pour inventer des noms improbables d'entreprises de plomberie... Il cite aussi des people à gogo, poussant le vice jusqu'à se mettre en scène lui-même dans une sorte de mise en abyme où il ne se fait guère de cadeaux, et où il ne se ménagera vraiment pas!...
Puis il fait le tour d'une vieille (vraie?) France crépusculaire, qui s'efface en ce début des années 2010 dans une mondialisation où l'on ne parle que de chinois, de russes, de low cost et de multinationales.
Le personnage principal, un artiste graphique du nom de Jed Martin, inadapté et incapable de sentiments car orphelin de mère et élevé par un père s'étant donné entièrement à son cabinet d'architectes, mais qui a réussi à percer sans même le vouloir vraiment, est une sorte de clone de l'auteur lui-même, qui fait ainsi se côtoyer, voire s'apprécier, ses deux représentants, l'explicite et l'implicite.
Le Houellebecq de papier connaîtra son apothéose avec une fin quelque part plutôt artistique, mais dans la catégorie trash-gore, tandis que le "héros" mourra de sa belle mort dans une vingtaine d'année, en ayant raté l'amour sans que cela ne le tourmente le moins du monde, le plus important pour lui étant peut-être d'avoir pu échanger quelques phrases avec son père peu avant la mort de celui-ci. Au passage, il se sera permis un étonnant accès de violence gratuite et sans lendemain.
Dans ce roman, nous ferons également la connaissance d'un vieux flic, désabusé comme il se doit, qui porte aussi en lui quelque chose d'houellebecquien...
Un Houellebecq donc omniprésent, qui réussit à traiter dans cet ouvrage de la vie, la mort, la solitude, l'amour, l'art... et même le tourisme. A ce propos, l'auteur, souvent prophétique par le passé, nous rassure totalement : la France industrielle dont il décrit cliniquement la fin va réussir sa transition économique pour se reconvertir pleinement dans le tourisme... devenant même une destination phare dans le domaine du... tourisme sexuel! Sacré Houellebecq, va! ;-)

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